Lettre de René Jacob à sa femme par les 3eA

Publié le par Professeur L

Otto Dix, Disparu, automne 1916, Bapaume, La Guerre (1924). Moma, New York, USA.

Otto Dix, Disparu, automne 1916, Bapaume, La Guerre (1924). Moma, New York, USA.

Année scolaire 2016-2017 – Collège Jules Vallès de Saint Leu d'Esserent

Niveau troisième – séquence 1 : écrire la guerre, témoigner pour résister

Séance 2

Objectifs : découvrir une description apocalyptique de la guerre, comprendre les stratégies d'écriture pour dire l'indicible

Support : lettre de René Jacob à sa femme. Extrait de Paroles de Poilus, Lettres et carnets du front 1914-1918 rassemblés par Jean-Pierre Guéno et Yves Laplume

Synthèse réalisée à l'aide des commentaires de Gabin, Lydie, Clara, Mathilde, Lili-Rose, Baptiste, Mathieu, Killian, Erwann, Martin

Le texte de René Jacob est une lettre destinée à sa femme. Il écrit cette lettre pour insister sur l'aspect négatif de la guerre qui l'a marqué. L'auteur a essayé de montrer ses émotions face à la mort, le dégoût des cadavres en putréfaction. Il a tenté de transmettre ce qu'il éprouve au cœur du champ de bataille, quand les combats sont terminés. Il a ainsi apporté un éclairage décisif sur la guerre. Il décrit la guerre comme un événement horrible, comme nous le prouvent les phrases du début : « Comment décrire ? Quels mots prendre ? », ce qui nous montre que la guerre pour lui a vraiment été atroce, car il ne trouve même pas les mots pour nous raconter ce qu'il a vécu. Ces questions rhétoriques permettent en outre de captiver le lecteur et d'exprimer la stupéfaction du soldat.

L'auteur réalise ici une description du champ de bataille autour de Meaux, en Seine et Marne : « Tout à l'heure nous avons traversé Meaux […], Meaux avec ses bateaux-lavoirs coulés dans la Marne », lors de la Première Guerre mondiale. Son écrit est centré sur l'abomination des combats, la désolation et la mort, ce qui met en évidence l'engagement de celui-ci. En effet, René Jacob souligne le mot « cadavres » pour créer une anaphore et accentuer l'horreur du lieu : « Des cadavres allemands », « des cadavres d'hommes », « des cadavres de chevaux ». Les figures de style permettent d'accentuer l'horreur que voit l'auteur sur « ce champ de carnage ». L'anaphore nous dévoile un aspect essentiel du texte : elle montre que même les animaux meurent durant la guerre. Les mots « noirâtres », « verdâtres », permettent d'insister sur la pourriture et la décomposition des corps humains et animaux. Ce vocabulaire est péjoratif pour forcer sur le côté monstrueux de la guerre.

De surcroît, il utilise des énumérations pour mettre l'accent sur l'abondance du carnage : « Des cadavres allemands, ici, sur le bord de la route, là, dans les ravins et les champs ». De plus, l'auteur nous révèle que tout est ravagé par la guerre, et que les hommes ne sont pas les seules victimes, alors qu'ils sont les seuls à l'avoir créée : « des cadavres de chevaux », « la ruine des choses ». Il exprime également sa vision apocalyptique de la guerre : « Non, pas champ de bataille, mais champ de carnage. » Tel le passage d'Attila à la fin de l'Antiquité et au début du Moyen-Age, la guerre détruit tout sur son passage. La phrase non-verbale : « Non, pas champ de bataille, mais champ de carnage », permet d'insister sur le mot de « carnage » qui semble selon l'auteur résumer la réalité de la guerre. La guerre détruit tout sur son passage comme l'Apocalypse.

Cette vision de la guerre a traumatisé le soldat à jamais, autant par l'odeur de la mort (« elle nous prend à la gorge, et pendant quatre heures, elle ne nous abandonnera pas »), que par la destruction : « la ruine des choses ». Cette lettre décrit la guerre en s'appuyant sur les sens : la vue et l'odorat : « une odeur effroyable », « une odeur de charnier », qui montre la puanteur engendrée par la guerre. L'auteur décrit les nombreux cadavres à terre qui moisissent, mais aussi les poses grotesques qu'ils ont pris en mourant : « Des cadavres d'hommes...les genoux pliés en l'air ou le bras appuyé au talus de la tranchée ». La guerre ne fabrique pas des héros. La guerre est une machine à fabriquer des morts. Les soldats n'ont pas de pose héroïque en mourant. L'auteur insiste beaucoup sur la laideur et l'horreur de la guerre grâce à un rythme lent créé grâce à la ponctuation : « une odeur effroyable, une odeur de charnier, monte de toute cette pourriture. »

L'auteur emploie le présent d'énonciation : « trace », « sens », « fait », mais aussi le futur de l'indicatif : « je n'oublierai jamais », pour montrer son traumatisme. Il utilise dans la dernière phrase, qui est pour moi la plus marquante, une structure emphatique pour insister sur les mots « saccage », « pillage » et « ruine ».

Ce qui m'a le plus intéressé est le fait que la guerre marque à tout jamais l'esprit d'un homme et que la guerre détruit tout, sans épargner personne, même pas les survivants. Ce texte est intéressant car il témoigne de la violence de la guerre. On peut sentir que l'auteur a été traumatisé par cet horrible spectacle qu'est la guerre. Ce texte procure une sensation d'horreur et de malaise. Au terme de ce parcours, ce texte me fait penser à celui que nous avons étudié précédemment (l''autoportrait d'Henri Aimé Gauthé), car il dénonce cette horreur pour rester humain, et il fait selon moi une catharsis, en exprimant ses sentiments les plus douloureux.

Cambrai, 1917.

Cambrai, 1917.

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