Fruit étrange par les 3eA 2016-2017

Publié le par Professeur L

"Le parfum doux et printanier des magnolias" (Abel Meeropo, Fruit étrange, 1937)

"Le parfum doux et printanier des magnolias" (Abel Meeropo, Fruit étrange, 1937)

SÉQUENCE 3 : DE LA POÉSIE LYRIQUE A LA POÉSIE ENGAGÉE

Agir dans la cité : individu et pouvoir

Dénoncer les travers de la société

Visions poétiques du monde

 

Problématique : dans quelle mesure la poésie permet-elle de résister ?

 

Séance 1 : mardi 10 janvier 2017

Support : « Fruit étrange » d'Abel Meeropol (1937) interprété par Billie Holiday (1939)

Objectifs :

- découvrir un poème engagé et implicite

- découvrir le registre pathétique

 

Synthèse collective élaborée à partir des copies d'Eugénie, Lydie, Jodie, Léa, Mélissia, Quentin, Mathieu, Trystan, Gabin, Maxime.

 

            Le texte étudié est un poème. Il s'intitule « Fruit étrange ». Il a été écrit par Abel Meeropol, professeur de littérature à New York, en 1937, pour dénoncer la ségrégation et le racisme. La ségrégation désigne le système politique et social qui impose la séparation des Noirs et des Blancs aux États-Unis, entre les années 1880 et 1964. La ségrégation a été instituée malgré l'abolition de l'esclavage. L'esclavage aux États-Unis avait été aboli en 1865, sous l'impulsion du Président Abraham Lincoln, après la guerre de Sécession (guerre civile qui a opposé le Nord industriel au Sud rural des États-Unis, et dont un des principaux enjeux était justement l'abolition de l'esclavage).  Il s'agit d'un racisme institutionnalisé qui engendre une série de discriminations à l'encontre des Afro-Américains. Ce poème a été repris en musique par la chanteuse de jazz Billie Holiday en 1939. Il a été également repris en 2007 par le groupe Aaron.

            Le texte décrit une scène qui se passe dans le Sud des Etats-Unis, comme l'indiquent les vers 1, 3 et 5 : « les arbres du Sud », « dans la brise du Sud », « du vaillant Sud ». Le texte a pour thème la ségrégation, et plus exactement le lynchage des Noirs par des groupes de Blancs dans la campagne profonde : « scène pastorale du vaillant Sud ». Ce poème est sombre. On ressent de la tristesse en le lisant et en l'écoutant. Il nous fait ressentir des émotions différentes comme de la peur : « l'odeur soudaine de la chair qui brûle ». Il transmet un message en dénonçant les injustices subies par les Noirs. Les Noirs étaient les boucs-émissaires des Blancs : ils se faisaient lyncher, brûler et pendre aux arbres. Leurs morts étaient douloureuses, comme on peut le voir dans les expressions suivantes : « les yeux révulsés et la bouche déformée » (vers 6). L'auteur utilise abondamment le champ lexical de la mort violente et en décomposition : « sang », « chair qui brûle ». Le texte est sombre, morbide, mélancolique. Il relève du registre pathétique. Tout est composé à partir de la métaphore du « fruit étrange », qui désigne en réalité le corps d'un homme pendu « aux peupliers ». L'emploi de la métaphore nous fait réfléchir et permet de créer un suspense, poussant le lecteur ou l'auditeur à en savoir plus. La métaphore nous fait également comprendre que tout se passe comme si des personnes étaient déshumanisées. L'auteur insiste sur la cruauté de ce châtiment injuste grâce à la structure emphatique « voici » : « voici un fruit que les corbeaux picorent », suivie d'une accumulation et d'un parallélisme insistant bien sur l'horreur de la scène. L'auteur veut nous expliquer la déshumanisation, non seulement des Noirs pendus comparés à des fruits, mais encore des personnes racistes qui s'abaissent à ces crimes, alors qu'elles se prétendent courageuses. C'est tout le sens du vers ironique : « Scène pastorale du vaillant Sud ».

             Le texte est intéressant car il dénonce la ségrégation. Il fait de l'effet aux lecteurs et aux auditeurs. Dans la dernière strophe, on peut trouver le texte malsain, car il installe une sensation étrange de malaise, comme si nous étions impliqués dans ce massacre. Le poème dénonce très bien l'atrocité de la période. Il peut marquer et faire réfléchir sur les actes de barbarie raciste. Il nous fait comprendre que le racisme est une idéologie mortifère. Cette composition est intéressante car elle dénonce la ségrégation et le lynchage de manière implicite grâce à la métaphore du « fruit étrange ». C'est un texte engagé et engageant. Il nous fait prendre conscience de cet acte de barbarie. Il fait bien comprendre tout en restant indirect, mais on peut le trouver également très triste, car il nous dévoile ce dont les hommes sont capables : tuer des hommes, massacrer des familles, semer la terreur, juste à cause d'une couleur de peau, alors que nous sommes tous égaux. Ce poème fait réfléchir, même si dans l'immédiat il n'a pas changé grand-chose, car la ségrégation n'a commencé à être abolie qu'à partir de 1964. Il a en tous les cas fait réfléchir indirectement. Il a sûrement inspiré Rosa Parks et Martin Luther King.

Scène quotidienne dans le Sud des Etats-Unis, pendant la ségrégation.

Scène quotidienne dans le Sud des Etats-Unis, pendant la ségrégation.

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