Autoportrait d'Henri Aimé Gauthé par Baptiste

Publié le par Professeur L

Mémorial franco-britannique de Thiepval dans la Somme en hommage aux soldats tombés lors de la Bataille de la Somme en 1916.

Mémorial franco-britannique de Thiepval dans la Somme en hommage aux soldats tombés lors de la Bataille de la Somme en 1916.

Henri Aimé Gauthé est un soldat français qui pendant la guerre a écrit un texte, le 10 janvier 1918 exactement. Ce texte est en réalité une poésie qui dresse son autoportrait physique et moral. C'est pourquoi il y a une omniprésence du pronom personnel "je". La poésie est écrite en alexandrin (vers de douze syllabes) et chaque vers possède donc deux hémistiches. La plupart des vers sont des antithèses, comme : "Je suis doux et timide avec des airs pervers." (vers 3) Ou parfois il y a deux antithèses dans le même vers, une dans chaque hémistiche, comme "Mon sourire est amer ; mon rire décevant" (vers 8). Le premier hémistiche révèle un aspect lumineux et calme, mais le second révèle plutôt un côté obscur du personnage : "doux" et "timide" s'opposent à "pervers" et "atroce". Nous avons trouvé quatre références auxquelles ce texte a pu nous faire penser, qui sont L'Etrange Cas du docteur Jekyll et Mister Hyde de Robert Louis Stevenson, Le Coeur révélateur d'Edgar Allan Poe, Notre-Dame de Paris de Victor Hugo et La Belle et la Bête de Leprince de Beaumont. Dans le récit de Stevenson comme dans celui d'Edgar Allan Poe, le personnage a une double personnalité, médecin le jour, criminel la nuit. Dans le roman de Victor Hugo, Quasimodo est un personnage difforme et laid, qui cache à l'intérieur de lui une part d'humanité. Enfin, l'auteur du poème peut faire penser au conte de la Belle et la Bête, car il s'identifie à une bête dont la destinaire de la lettre peut seule voir la beauté intérieure.

Le poème est aussi composé de rimes mélancoliques. L'aspect du deuxième hémistiche est dû à la guerre qui le transforme en monstre. Pour lui, son corps et son âme s'enlaidissent à cause de la guerre. Dans le texte, il y a une comparaison : "Ma lèvre est rouge comme une fraîche blessure" (vers 10) qui fait bien sûr penser à la guerre et au sang qui coule. Pour l'auteur, la guerre est devenue un élément incontournable, et sans la guerre, on ne saurait comprendre sa personnalité. La guerre a engendré en lui la méchanceté et la grossièreté. Logiquement, la guerre est censée fabriquer des héros, mais pour lui, tuer n'est pas un acte héroïque. Donc il se prend pour un anti-héros. Il devient même l'ennemi à combattre : "j'ai la moustache en cru du Kaiser allemand." Tout en lui rappelle la guerre et ses atrocités. C'est pourquoi il se compare également à Don Quichotte, le héros de Cervantes qui se prend pour un grand chevalier en confondant les géants et les moulins à vent. Le héros de notre texte est un copie pâle, un ridicule chevalier comme Don Quichotte. Le vers qui fait penser à Don Quichotte est le suivant : "Je suis le chevalier de la piètre figure." (vers 13) Sa transformation en monstre l'éloigne de l'humain. Il est déshumanisé par la guerre. Il est détruit moralement et physiquement. Ce texte est aussi une catharsis, qui est une tentative de lutter contre la déshumanisation et aussi de ne pas perdre sa dignité, et donc de rester humain.

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