Germinal de Zola, quatrième partie, chapitre I, commentaire de Camille
Texte 3
Année scolaire 2018-2019 – Lycée Cassini (Clermont-de-l'Oise)
Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme
Etude d'une œuvre intégrale : Germinal de Zola (1885)
Séance 3 : Germinal - Zola - Quatrième partie - chapitre 1
Comment l'auteur parvient-il à dresser une satire du paradis bourgeois ?
Commentaire de Camille
Les remarques en italique sont rajoutées par le professeur.
Tout d’abord, Zola décrit un paradis bourgeois. Ce paradis est complètement l’opposé de la mine. Madame Hennebeau reçoit des convives. Chaque invité a sa place. Ils sont tous attablés dans une salle habillée de tapisseries flamandes, où trônent de vieux meubles, et ornée de pièces argentées : « Dans cette salle tendue de tapisseries flamandes, meublée de vieux bahuts de chêne. Des pièces d’argenterie luisaient derrière les vitraux des crédences. » (page 308 de l’édition folio). L’accumulation est employée pour décrire cette pièce meublée et luxueuse. L’auteur insiste sur la lumière qui est celle de l’argent pour insister sur le luxe du décor aux antipodes du monde ténébreux de la mine. Ensuite Zola utilise la métaphore pour évoquer « les rondeurs polies » (page 308) de la suspension en cuivre, expression que l’on emploie plus pour décrire le corps. Cela donne au décor une image de raffinement, de douceur et de féminité. Madame Hennebeau a des domestiques, ce qui est une marque de richesse. Dans la pièce où sont attablés les convives, la joie et le bonheur sont plus que présents. L’atmosphère est heureuse, sereine et chaleureuse. Dans la pièce il fait bon et chaud, alors que dehors il fait froid : « Dehors, la journée de décembre était glacée » (page 308). Emile Zola emploie une opposition ou une antithèse afin de mettre en avant la différence de température et d’atmosphère, comme le prouve l’exemple suivant : « il faisait là une tiédeur de serre ». L’auteur se sert de « tiédeur de serre » pour montrer la différence de température. Il insiste sur l’opposition entre dehors et dedans pour montrer le confort matériel dans lequel baignent les bourgeois, qui ne sont pas soumis aux rudesses du climat comme c’est le cas pour les ouvriers entassés dans les corons mal isolés.
De plus Zola développe une satire bourgeoise. Cette satire fait ressortir la peur et la tristesse des bourgeois. Leur bonheur n’est pas réel. Ce n’est qu’une façade : « cette gaieté forcée » (page 309). L’auteur emploie l’accumulation pour montrer qu’ils jouent un rôle : « On ne posa plus un verre ni une fourchette, sans prendre de précautions, on salua chaque plat, ainsi qu’une épave échappée à un pillage dans une ville conquise, et, derrière cette gaieté forcée ». Emile Zola met l’accent sur le jeu de rôle grâce à une antiphrase. Il évoque les bourgeois qui exagèrent dans l’expression du bonheur. La comparaison employée identifie les bourgeois à des rescapés d’un désastre qui craignent de mourir de faim à cause de la révolte des mineurs. Leur voracité et leur goinfrerie sont d’autant plus choquantes dans le contexte de misère économique qui frappe le monde ouvrier dans le roman. Zola se moque de la pusillanimité et de la lâcheté des bourgeois en démasquant leurs craintes les plus secrètes.
Dès le début de la deuxième partie du roman, une antithèse est construite par l’auteur entre la vie des ouvriers et celle des bourgeois. L’écrivain met en valeur la profusion, l’abondance du monde bourgeois et l’égoïsme de ces derniers grâce à une accumulation : « Après les œufs brouillés aux truffes, parurent des truites de rivière. La conversation était tombée sur la crise industrielle. » Les bourgeois se plaignent alors qu’ils sont en train de manger à leur faim. Ils se goinfrent tout en accusant la paresse des ouvriers qui font la grève pour pouvoir manger à leur faim.
Au terme de cette analyse, Emile Zola parvient à dresser une satire du paradis bourgeois en employant des procédés liés à la caricature, comme l’antithèse entre les corons ouvriers et la demeure bourgeoise, l’hyperbole, la comparaison et l’accumulation. L’ironie est également employée pour démasquer le cynisme et la goinfrerie des bourgeois. On retrouve la même satire et la même ironie dans Le Ventre de Paris lorsque l’auteur, à travers le personnage de Claude Lantier, déploie sa théorie de la bataille des Gras contre les Maigres. Les bourgeois attaquent les ouvriers et leur reprochent d’être misérables au moment même où ils s’engraissent grâce à l’exploitation des prolétaires.