Discours contre l'esclavage moderne en France par Léane et Salomée en seconde 13
Je l’avoue, j’y ai réfléchi . J’ai réfléchi à cette abomination qui consiste à soumettre la chair noire à se remettre les chaines, qui ont elles-mêmes été enlevées il y a un peu moins de deux siècles. Mais enfin, Bug Jargal, Moi Tituba sorcière ou encore Congo ne vous évoquent-ils rien ? La loi est-elle aussi inconnue? Cette même loi, bafouée, entravée, ne vaut-elle rien au point de l’enfreindre ? Votre fameuse devise « Liberté Égalité Fraternité », après ces actes terrifiants, ne vaut plus rien d’après moi !
Je l’ai vu.
Ce que je pensais terminé depuis le 27 avril 1848 est bel et bien revenu. Comme la peste, c’est un véritable fléau. Je me rendais alors à un gala chez un « ami » fortuné lorsque je les ai aperçus…
Un homme noir coupait sous la chaleur insoutenable de grandes haies pendant qu’une femme frottait un sol déjà propre et un enfant, oui, un enfant se tenait debout, vêtu d’un costume de serviteur, un plateau rempli de coupes de champagne…
Ils avaient tous la même expression faciale : aucune. Aucune expression n’était présente sur leur visage sauf celle de la peur. J’ai été si choqué que je n’ai même pas pu aller leur parler. En revanche, j’en ai parlé à leur soi-disant maître qui se vantait d’avoir tant d’employés sans avoir à les payer ni à les nourrir correctement.
Un sentiment de haine si profond m’a envahi à tel point que je suis parti en courant, en laissant ces pauvres gens à la merci d'un prédateur si cruel. C’est pourquoi j’écris aujourd’hui ce discours en espérant que ce sentiment de culpabilité disparaîtra…
Comment un homme peut-il oser déshumaniser un semblable de la sorte ? Certes, nous sommes tous différents : nous ne naissons pas des mêmes mères, pas dans les mêmes hôpitaux, ou encore pas dans les mêmes classes sociales … Un seul point nous unit cependant, et ce, dès notre arrivée dans ce monde : c’est notre liberté. Toucher la liberté d'un homme revient à remettre en cause la liberté de tous les autres.
Mais qui êtes-vous, qui sommes-nous, pour décider d'enlever la liberté d’un homme ?
Dans un monde où nous sommes si petits, pourquoi vouloir rendre encore plus minuscule une communauté, sous prétexte qu'elle nous serait inférieure par sa couleur, ce qui est une absurdité d'un point de vue scientifique, moral et politique ?
Dans une société si évoluée, je déplore avec regret le retour de cette aliénation.
Des travaux si durs et si éprouvants ne peuvent-ils pas être faits par notre si brillante technologie ? Nos avancées technologiques nous permettent aujourd’hui de pouvoir travailler dans les champs sans la force d’un humain. Pourquoi alors user et abuser des mains de nos frères, sous prétexte qu’elles sont noires ?
La couleur de peau vous est-elle si importante au point d’en oublier vos valeurs ? Les sentiments on-t-il aussi une couleur ? J’en appelle à votre bon sens, à votre âme d’être humain…
Il faut dès aujourd’hui lutter contre cette maladie qui rabaisse petit à petit au rang d’animaux tous les Français.
Chaque heure qui passe où nous devenons plus complices les uns que les autres de cet esclavage moderne, un homme, une femme, et, je le pleure, un enfant, perdent leur humanité et leur statut au sein de notre société.
Rester caché ne vous rendra pas service : cela ne vous ne rendrait que plus coupable.
Ce n’est pas un crime d’éprouver de la compassion à l’égard de toutes ces âmes en perdition. Je dirais que c’est même un devoir.
De voir ces pauvres gens travailler en étant forcés de vivre dans la précarité et sans salaire fait grandir en moi ce sentiment d’injustice et de pitié si puissant que mon seul repos ne sera que quand la victoire contre ce désastre humanitaire sera proclamée.
Faites votre devoir de citoyens français, votre déclaration des Droits de l’Homme et votre cœur vous l’ordonnent.
Car un spectre hante notre pays ! J’en appelle à la révolte, une révolte si puissante qu’elle fera taire et disparaitre l’esclavage à jamais.
Détruisons ces pratiques contre nature et rendons enfin justice à de si longues années de combats contre l’esclavage.