Mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar 3eB

Publié le par Professeur L

Buste d'Antinoüs, IIè siècle après Jésus-Christ. Musée du Prado, Madrid, Espagne.

Buste d'Antinoüs, IIè siècle après Jésus-Christ. Musée du Prado, Madrid, Espagne.

SÉQUENCE 3 : ÉCRIRE SUR SOI

ÉTUDE D'UNE ŒUVRE INTÉGRALE

MÉMOIRES D'HADRIEN DE MARGUERITE YOURCENAR

 

Séance 1 : mardi 12 janvier 2016

Support : Mémoires d'Hadrien pp. 12-14

Objectifs :

- s'entraîner au DNB

- découvrir le style togé

- découvrir les registres

 

Question 1:

Le narrateur n'a pas peur de la mort mais il sait qu'il va mourir : « Dire que mes jours sont comptés ne signifie rien » Il ne pleure pas et ne montre pas sa souffrance car il explique : « il en fut toujours ainsi, il en est ainsi pour nous tous ». Il a conscience que mourir fait partie des lois naturelles. L'auteur accepte sa mort, reconnaît qu'il va mourir. Il généralise même ses propos en passant du terme « mes jours » à « nous tous ». Ce passage montre aussi qu'il veut mourir dignement, ce qui rappelle l'assassinat de Jules César qui se cache sous sa toge pour conserver sa dignité. C'est ce que l'on appelle le style togé.

 

Question 2 : Il a conscience de mourir bientôt avec l'image de ce voyageur qui après un long périple arrive sur un archipel : « Comme le voyageur...le profil de ma mort. » Cette image est celle du voyage d'Ulysse. C'est une comparaison lyrique car il identifie la vie à une aventure et la mort à la fin de son errance. Il ressent de la mélancolie arrivé au terme de son odyssée.

 

Question 3 : Le narrateur compare sa vie à des choses dont l'intérieur est vide : « ma vie ressemble...à occuper tout entier. » Il se sent vidé, épuisé, exténué par la guerre qui a provoqué tant de mort. Il a l'impression d'être détruit de l'intérieur, que la maladie prend le dessus sur son corps. Il se compare à un palais vide car il lui manque quelque chose même s'il est empereur. Il considère sa vie appartenant au passé et cela montre encore une fois qu'il sait qu'il va mourir dans peu de temps.

Mur d'Hadrien, IIème siècle après Jésus-Christ, nord de l'Angleterre.

Mur d'Hadrien, IIème siècle après Jésus-Christ, nord de l'Angleterre.

Question 4 : Le narrateur considère la chasse comme un loisir. Il a conscience que la chasse est un loisir cruel. Comme le prouve le passage suivant : « j'ai longtemps entretenu avec la Diane des forêts les rapports changeants et passionnées d'un homme avec l'objet aimé. » L'auteur emploie une personnification qui est en même temps une périphrase pour caractériser son rapport à la chasse. Ces figures de style montrent qu'il a conscience que la chasse est une activité passionnante, mais également dangereuse et cruelle. Enfin, il considère les animaux comme des amis.

 

Question 5 : La chasse lui a appris l'art politique : « commandement » et l'art militaire : « danger ». Plus précisément, il a appris le courage en affrontant la mort, mais également la pitié envers ses adversaires. En chassant les animaux, il a donc appris à être humain. On en conclue donc que la chasse lui a été très instructive dans son exercice impérial. La chasse est un loisir didactique.

 

Question 6 : Il préfère les animaux aux hommes car les animaux ne tromperont ni ne mentiront jamais à la différence de l'humanité notamment dans le monde politique : « ce juste combat...les embûches des hommes ». Il y a une honnêteté chez les animaux. La phrase : « Ce juste combat entre l'intelligence humaine et la sagacité des bêtes...embûches des hommes » est la preuve que pour Hadrien, les animaux possèdent plus de dignité que certains hommes, comme par exemple les hommes politiques qui attaquent, mentent ou cachent certaines choses et tendent des pièges. L'empereur préfère se battre avec un être vivant, noble et vaillant, qu'avec un lâche, un menteur ou un traître. Par conséquent, le narrateur préfère dans ce passage les animaux aux hommes car ces derniers peuvent commettre des actes indignes, comme voler, mentir ou trahir.

Temple d'Hadrien à Ephèse, Turquie.

Temple d'Hadrien à Ephèse, Turquie.

Question 7. Le narrateur ne chasse plus pour deux raisons : la perte d'un être cher et la maladie liée à la vieillesse. En effet, c'est le décès d'un proche qui a provoqué chez l'empereur la perte du désir de chasser, alors que cette activité était pour lui une passion qu'il compare à l'amour : « J'ai toujours entretenu avec la Diane des forêts les rapports changeants et passionnés d'un homme avec l'objet aimé ». La périphrase poétique « Diane des forêts » désigne la chasse. En identifiant cette activité à une déesse romaine, le narrateur met en évidence sa passion et son attachement pour la poursuite et l'affrontement avec les animaux. Il montre que pour lui cette activité le ramène d'une certaine manière à ce qu'il y a de divin ou de sacré dans la nature. Il suggère enfin que pratiquer la chasse, c'est rendre honneur aux dieux. C'est même, d'une certaine manière, imiter les dieux, et donc se conduire comme un dieu. Mais cette ode à la chasse est hantée par la silhouette d'un être aimé qui est parti trop tôt : « Mais le compagnon de mes dernières chasses est mort jeune. » Le deuil a éteint en lui l'amour de la chasse. Enfin, son âge (« j'ai soixante ans ») et sa maladie (« un homme qui s'apprête à mourir d'une hydropisie du cœur ») sont un obstacle à l'accomplissement d'une activité aussi physique et dangereuse que la chasse.

 

Question 8. Le registre utilisé dans ce texte est à la fois pathétique et lyrique. Pathétique, car on sent que le narrateur éprouve de la morosité liée à la maladie et à la perspective de la mort. On a vu que l'empereur Hadrien se décrivait comme un vieil homme souffrant d'une maladie mortelle, incapable de s'adonner aux passions de sa jeunesse comme la chasse. Mais ce texte est aussi lyrique, car l'auteur développe un sentiment de nostalgie lié à la fuite du temps et à la disparition de sa jeunesse. Il réutilise ainsi une image d'origine homérique et platonicienne, en rappelant que la vie est un voyage et que, comme tout périple, elle a un terme. Mais ce lyrisme ( cette expression personnelle et intime des sentiments) n'est pas larmoyant. L'auteur ne cherche pas à susciter la pitié. Il ne se plaint pas de son sort : « je ne suis pas encore assez faible pour céder aux imaginations de la peur ». Au contraire, il essaie de conserver sa dignité et évoque sa mort prochaine avec sang-froid. Il semble accepter son sort tragique avec une fermeté stoïcienne : « Dire que mes jours ne signifie rien : il en fut toujours ainsi, il en est ainsi pour nous tous. » Hadrien a en effet conscience que le sort qui l'attend concerne la condition humaine. Il passe de la première personne du singulier (mes jours) à la première personne du pluriel (nous tous), ce qui prouve qu'il établit une distance par rapport à lui, et entre lui et la mort, en rappelant son universalité : tout le monde mourra, y compris les hommes qui exercent la fonction d'empereur. Le registre lyrique est ici empreint de solennité, de noblesse, d'honnêteté, de courage, de lucidité et de dignité. On parle de lyrisme togé (en référence à la toge de l'Empereur, et notamment à celle que Jules César a utilisée pour cacher son visage lorsqu'il a été assassiné par les sénateurs romains).

Buste de l'Empereur Hadrien, IIème siècle après Jésus-Christ, en vêtements grecs, provenant du temple d'Apollon à Cyrène, 117-125, British Museum, Londres, Angleterre.

Buste de l'Empereur Hadrien, IIème siècle après Jésus-Christ, en vêtements grecs, provenant du temple d'Apollon à Cyrène, 117-125, British Museum, Londres, Angleterre.

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