Le Familistère de Godin à Guise, ou l'anti-Germinal. Visite avec la seconde 12.

Publié le par Professeur L

Le Familistère de Jean-Baptiste André Godin à Guise, Aisne, France.

Le Familistère de Jean-Baptiste André Godin à Guise, Aisne, France.

I. Les principes fondateurs du projet de Jean-Baptiste André Godin

 

- Godin en 1848 se déclare fouriériste (partisan des idées de Fourier)

- Démocratie à l'intérieur de l'entreprise : organise caisse de secours mutuel gérée directement par un comité d'ouvriers élus par leurs pairs

- Instaure au sein de l'entreprise une démocratie sociale

- Les ouvriers : travaillent moins et gagnent plus qu'ailleurs

- 3 piliers : efficacité économique (bénéfices), reconnaissance de la valeur du travail, innovation

- Achète le terrain voisin de l'entreprise pour en faire un jardin d'agréments au service de ses ouvriers pendant les pauses

Familistère de Godin à Guise. La cour intérieure du pavillon central.

Familistère de Godin à Guise. La cour intérieure du pavillon central.

A l'intérieur de chaque pavillon est aménagée une cour centrale, particulièrement lumineuse, protégée par une immense verrière de plus de mille mètres carrés. Le logement collectif ainsi conçu facilite les échanges, favorise la multiplication des relations, tout en assurant la sécurité physique des personnes : « Au Familistère, 1500 personnes peuvent se voir, se visiter, vaquer à leurs occupations domestiques, se réunir dans les lieux publics, et faire leurs approvisionnements, sous galeries couvertes, sans s'occuper du temps qu'il fait, et sans avoir jamais plus de 160 mètres à parcourir. »

A l'intérieur de chaque pavillon est aménagée une cour centrale, particulièrement lumineuse, protégée par une immense verrière de plus de mille mètres carrés. Le logement collectif ainsi conçu facilite les échanges, favorise la multiplication des relations, tout en assurant la sécurité physique des personnes : « Au Familistère, 1500 personnes peuvent se voir, se visiter, vaquer à leurs occupations domestiques, se réunir dans les lieux publics, et faire leurs approvisionnements, sous galeries couvertes, sans s'occuper du temps qu'il fait, et sans avoir jamais plus de 160 mètres à parcourir. »

A chaque étage (chaque pavillon comprend quatre niveaux d'habitations dont trois étages), une rue-galerie permet de circuler entre les logements. Chacune d'elle fait 1m30 de largeur. La balustrade a une hauteur de 1 mètre et les barreaux ronds sont espacés de 12 centimètres : ainsi la sécurité des enfants est assurée. Les rues-galeries permettent à chaque Familistérien de se croiser sans se bousculer. Les habitants peuvent de cette manière discuter entre eux, tranquillement.

A chaque étage (chaque pavillon comprend quatre niveaux d'habitations dont trois étages), une rue-galerie permet de circuler entre les logements. Chacune d'elle fait 1m30 de largeur. La balustrade a une hauteur de 1 mètre et les barreaux ronds sont espacés de 12 centimètres : ainsi la sécurité des enfants est assurée. Les rues-galeries permettent à chaque Familistérien de se croiser sans se bousculer. Les habitants peuvent de cette manière discuter entre eux, tranquillement.

Très tôt, Godin opte pour le logement collectif plutôt qu'individuel, car il s'agit de former des individus qui ont conscience d'appartenir à un tout. Or la maison individuelle favorise selon Godin l'individualisme : « Les prôneurs de petites maisons ne remarquent pas qu'en descendant un peu, à partir de la petite maison, on voit poindre la hutte du sauvage […] Dans les campagnes, le mendiant en haillons possède un toit et un jardin. […] L'isolement des maisons est non seulement inutile, mais nuisible à la société. »   L'association est la condition nécessaire à tout progrès social. Le logement doit donc favoriser cette association. D'où le choix du logement collectif. De plus, le logement collectif facilite par la mise en commun les « équivalents de la richesse » pour les ouvriers : « Les maisons disparates de nos villages, placées sans ordre, sans alignement, sans aucune préoccupation de l'hygiène, ni de la salubrité, sont plus souvent un lieu de tortures, un sujet de dégradation physique et morale des individus, qu'un lieu de tranquillité et de repos. En association, la construction de l'habitation cesse d'être abandonnée à l'ignorance et à la pauvreté des moyens de chacun ; car ce que les ressources isolées ne permettent pas d'accomplir, devient possible lorsque ces ressources sont réunies. » Le logement collectif favorise l'association et la mise en commun des moyens pour faciliter la mise en place des « équivalents de la richesse », qui seraient impossible à mettre en œuvre dans un dispositif de maisons individuelles : « Voilà pourquoi le FAMILISTERE a été fondé. Ne pouvant faire un Palais de la chaumière ou du galetas de chaque famille ouvrière, nous avons voulu mettre la demeure de l'Ouvrier dans un Palais ; le Familistère, en effet, n'est pas autre chose, c'est le Palais du Travail, c'est le PALAIS SOCIAL de l'avenir. »   L'architecture du « Palais social » doit rendre possible la fraternité qui est au cœur du projet de Godin : « C'est la Fraternité pratique, s'inaugurant dans le palais unitaire et splendide, où il n'est plus de parias, où l'on ne rencontre désormais que des Hommes ! »  Il ne s'agit donc pas de construire des logements bon marché pour répondre à un besoin tout en réalisant des économies. Le but qui doit guider la société comme l'architecture doit être le confort, le progrès social et la fraternité : « l'habitation véritablement progressive, c'est le PALAIS SOCIAL. »  Les dispositions architecturales doivent favoriser ces objectifs. D'ailleurs, le Familistère n'a pas pour mission de loger seulement les ouvriers. Il s'agit d'un projet architectural destiné à l'ensemble de la société. D'où l'analogie avec le chemin de fer : « il faut que l'architecture fasse un nouvel effort pour créer l'habitation qui doit être au progrès de la sociabilité, ce que les chemins de fer sont à celui de la circulation. »  De même que les chemins de fer aident au transport des ouvriers comme des capitalistes, de même le Familistère a pour fonction de loger toutes les catégories sociales et de les faire progresser dans un même mouvement et dans un même élan de liberté, d'égalité et de fraternité.

Très tôt, Godin opte pour le logement collectif plutôt qu'individuel, car il s'agit de former des individus qui ont conscience d'appartenir à un tout. Or la maison individuelle favorise selon Godin l'individualisme : « Les prôneurs de petites maisons ne remarquent pas qu'en descendant un peu, à partir de la petite maison, on voit poindre la hutte du sauvage […] Dans les campagnes, le mendiant en haillons possède un toit et un jardin. […] L'isolement des maisons est non seulement inutile, mais nuisible à la société. » L'association est la condition nécessaire à tout progrès social. Le logement doit donc favoriser cette association. D'où le choix du logement collectif. De plus, le logement collectif facilite par la mise en commun les « équivalents de la richesse » pour les ouvriers : « Les maisons disparates de nos villages, placées sans ordre, sans alignement, sans aucune préoccupation de l'hygiène, ni de la salubrité, sont plus souvent un lieu de tortures, un sujet de dégradation physique et morale des individus, qu'un lieu de tranquillité et de repos. En association, la construction de l'habitation cesse d'être abandonnée à l'ignorance et à la pauvreté des moyens de chacun ; car ce que les ressources isolées ne permettent pas d'accomplir, devient possible lorsque ces ressources sont réunies. » Le logement collectif favorise l'association et la mise en commun des moyens pour faciliter la mise en place des « équivalents de la richesse », qui seraient impossible à mettre en œuvre dans un dispositif de maisons individuelles : « Voilà pourquoi le FAMILISTERE a été fondé. Ne pouvant faire un Palais de la chaumière ou du galetas de chaque famille ouvrière, nous avons voulu mettre la demeure de l'Ouvrier dans un Palais ; le Familistère, en effet, n'est pas autre chose, c'est le Palais du Travail, c'est le PALAIS SOCIAL de l'avenir. » L'architecture du « Palais social » doit rendre possible la fraternité qui est au cœur du projet de Godin : « C'est la Fraternité pratique, s'inaugurant dans le palais unitaire et splendide, où il n'est plus de parias, où l'on ne rencontre désormais que des Hommes ! » Il ne s'agit donc pas de construire des logements bon marché pour répondre à un besoin tout en réalisant des économies. Le but qui doit guider la société comme l'architecture doit être le confort, le progrès social et la fraternité : « l'habitation véritablement progressive, c'est le PALAIS SOCIAL. » Les dispositions architecturales doivent favoriser ces objectifs. D'ailleurs, le Familistère n'a pas pour mission de loger seulement les ouvriers. Il s'agit d'un projet architectural destiné à l'ensemble de la société. D'où l'analogie avec le chemin de fer : « il faut que l'architecture fasse un nouvel effort pour créer l'habitation qui doit être au progrès de la sociabilité, ce que les chemins de fer sont à celui de la circulation. » De même que les chemins de fer aident au transport des ouvriers comme des capitalistes, de même le Familistère a pour fonction de loger toutes les catégories sociales et de les faire progresser dans un même mouvement et dans un même élan de liberté, d'égalité et de fraternité.

  1. Le Familistère n'est pas une cité ouvrière

 

L'objectif : permettre à la classe ouvrière d'accéder à l'émancipation (liberté) en sortant de la misère

Godin va visiter 3 cités ouvrières :

  1. La cité Napoléon (Paris)
  2. Le site du Grand-Hornu (Belgique) : corons
  3. Les cités de Mulhouse

 

  1. La cité Napoléon : un logement collectif : « caserne » : l'absence de liberté, les ouvriers ont l'impression d'être tout le temps contrôlés
  2. Les corons du Grand-Hornu : 7 personnes dans 55 m2, mal isolé, promiscuité. Volonté d'avoir une main-d’œuvre toujours à disposition.
  3. Les cités de Mulhouse : maisons individuelles et mitoyennes pour 4 familles. Jardin. Possibilité d'accéder à la propriété individuelle et privée. Mais favorise l'individualisme.

 

Ces patrons étaient paternalistes : or le paternalisme maintient les ouvriers dans une situation d'infériorité morale.

Godin conçoit avec plus de cinquante ans d'avance le principe de fonctionnalité qui régira l'architecture moderne telle qu'elle sera pensée avec Walter Gropius, fondateur du Bauhaus, et Le Corbusier. Mais il rajoute à ce principe de fonctionnalité (lié à ce qu'il appelle « les équivalents de la richesse ») un principe esthétique et le principe de coopération ou d'association. Le principe esthétique d'abord : le Familistère n'est pas seulement remarquable par ses dimensions. Il n'est pas seulement confortable grâce à ses fonctionnalités. Il est aussi raffiné dans sa construction. Tout a été construit avec soin et dans un souci esthétique, ce qui permet formellement de différencier le Palais social d'une caserne ouvrière. Godin apporte un grand soin à la décoration, à l'élaboration de frises, de pilastres, de tableaux et de frontons sur les façades extérieures. Les joints de la maçonnerie sont polychromes. Le relief des encadrements de baies et de pilastres est renforcé par la chaux rouge et noire qui constitue les joints.

Godin conçoit avec plus de cinquante ans d'avance le principe de fonctionnalité qui régira l'architecture moderne telle qu'elle sera pensée avec Walter Gropius, fondateur du Bauhaus, et Le Corbusier. Mais il rajoute à ce principe de fonctionnalité (lié à ce qu'il appelle « les équivalents de la richesse ») un principe esthétique et le principe de coopération ou d'association. Le principe esthétique d'abord : le Familistère n'est pas seulement remarquable par ses dimensions. Il n'est pas seulement confortable grâce à ses fonctionnalités. Il est aussi raffiné dans sa construction. Tout a été construit avec soin et dans un souci esthétique, ce qui permet formellement de différencier le Palais social d'une caserne ouvrière. Godin apporte un grand soin à la décoration, à l'élaboration de frises, de pilastres, de tableaux et de frontons sur les façades extérieures. Les joints de la maçonnerie sont polychromes. Le relief des encadrements de baies et de pilastres est renforcé par la chaux rouge et noire qui constitue les joints.

En théorie, chaque logement standard possède deux pièces de 20 mètres carrés chacune, avec 3 mètres de hauteur. Mais les appartements sont extensibles en fonction des besoins et des moyens de chaque famille. Plus la famille s’agrandit, plus le logement s’agrandit. Une famille peut ainsi loger dans un appartement de quatre pièces (soit 80 mètres carrés). Au début des années 1870, les ouvriers familistériens sont mieux logés que les bourgeois parisiens.

En théorie, chaque logement standard possède deux pièces de 20 mètres carrés chacune, avec 3 mètres de hauteur. Mais les appartements sont extensibles en fonction des besoins et des moyens de chaque famille. Plus la famille s’agrandit, plus le logement s’agrandit. Une famille peut ainsi loger dans un appartement de quatre pièces (soit 80 mètres carrés). Au début des années 1870, les ouvriers familistériens sont mieux logés que les bourgeois parisiens.

Dans chaque appartement, au moins une pièce donne sur la cour intérieure, et une autre sur le jardin extérieur, afin d'articuler lien social et intimité, fraternité et liberté. Toutes les pièces ne sont pas visibles de la cour centrale ou des galeries, afin de préserver l'intimité de chacun. Mais pour favoriser la fraternité, et lutter contre les instincts qui poussent les individus vers l'égoïsme et le repli sur soi, la propriété privée n'existe pas au Familistère. Tout le monde est locataire de l'Association du Travail et du Capital, y compris le patron, et le loyer ne doit pas excéder 5 % du salaire de l'ouvrier. Les Familistériens ne sont donc en aucun cas prisonniers du projet de Godin. N’habitent ici que les ouvriers qui le souhaitent et qui sont acceptés par un comité représentatif de l'Association. En revanche, Godin a insisté pour que les contremaîtres, les cadres, les ingénieurs et les directeurs habitent également ici, avec les ouvriers. En 1870, le Familistère comprend également deux médecins et une sage-femme parmi les habitants. Ces médecins disposent d'une salle de service médical et d'une pharmacie. Ainsi, la population du Familistère passe de 350 habitants en 1863 à 800 en 1866. Dix ans plus tard, en 1876, 865 personnes habitent au Familistère.

Dans chaque appartement, au moins une pièce donne sur la cour intérieure, et une autre sur le jardin extérieur, afin d'articuler lien social et intimité, fraternité et liberté. Toutes les pièces ne sont pas visibles de la cour centrale ou des galeries, afin de préserver l'intimité de chacun. Mais pour favoriser la fraternité, et lutter contre les instincts qui poussent les individus vers l'égoïsme et le repli sur soi, la propriété privée n'existe pas au Familistère. Tout le monde est locataire de l'Association du Travail et du Capital, y compris le patron, et le loyer ne doit pas excéder 5 % du salaire de l'ouvrier. Les Familistériens ne sont donc en aucun cas prisonniers du projet de Godin. N’habitent ici que les ouvriers qui le souhaitent et qui sont acceptés par un comité représentatif de l'Association. En revanche, Godin a insisté pour que les contremaîtres, les cadres, les ingénieurs et les directeurs habitent également ici, avec les ouvriers. En 1870, le Familistère comprend également deux médecins et une sage-femme parmi les habitants. Ces médecins disposent d'une salle de service médical et d'une pharmacie. Ainsi, la population du Familistère passe de 350 habitants en 1863 à 800 en 1866. Dix ans plus tard, en 1876, 865 personnes habitent au Familistère.

Les escaliers sont conçus par Godin pour favoriser aussi bien l'adulte que l'enfant. La hauteur des marches est adaptée en fonction de l'endroit où l'on se place.

Les escaliers sont conçus par Godin pour favoriser aussi bien l'adulte que l'enfant. La hauteur des marches est adaptée en fonction de l'endroit où l'on se place.

Godin a créé un véritable système de climatisation et de ventilation qui permet d’éviter l’effet de serre. Des ouvertures ont été créées au niveau des caves, ce qui permet de renouveler l’air et de maintenir un climat tempéré toute l’année.

Godin a créé un véritable système de climatisation et de ventilation qui permet d’éviter l’effet de serre. Des ouvertures ont été créées au niveau des caves, ce qui permet de renouveler l’air et de maintenir un climat tempéré toute l’année.

.  A l'intérieur de chaque pavillon est aménagée une cour centrale, particulièrement lumineuse, protégée par une immense verrière de plus de mille mètres carrés. La verrière est ajourée de façon à faciliter la circulation de l'air, et donc assurer une température ambiante toute l'année.

. A l'intérieur de chaque pavillon est aménagée une cour centrale, particulièrement lumineuse, protégée par une immense verrière de plus de mille mètres carrés. La verrière est ajourée de façon à faciliter la circulation de l'air, et donc assurer une température ambiante toute l'année.

La verrière est en elle-même une véritable prouesse architecturale. Le progrès technique et architectural est indissociable du progrès social pour Godin.

La verrière est en elle-même une véritable prouesse architecturale. Le progrès technique et architectural est indissociable du progrès social pour Godin.

Le pavillon gauche a été reconstruit après les destructions perpétrées par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale. Le luxe apporté à cette reconstruction témoigne de l'importance économique et financière de l'Association du Capital et du Travail.

Le pavillon gauche a été reconstruit après les destructions perpétrées par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale. Le luxe apporté à cette reconstruction témoigne de l'importance économique et financière de l'Association du Capital et du Travail.

Disposée au centre du site, en face du pavillon central, afin de montrer son importance et sa fonction stratégique, l'école constitue l'innovation principale de Godin. La réforme architecturale a déjà une mission d'éducation : si l'ouvrier va au cabaret, si la famille ouvrière se délite, si les enfants vagabondent, c'est d'abord parce que jusqu'à présent le logement ouvrier était un taudis sordide et insalubre. En proposant un logement et une architecture créant la condition des satisfactions des besoins élémentaires, la famille ouvrière est protégée de la débauche et de l'immoralité. Elle acquiert le sentiment d'une assurance de bien-être. Mais les dispositions architecturales du logement ne suffisent pas pour éduquer les ouvriers. L'école est ainsi la clé de voûte du système familistérien, indispensable à la réussite du projet de Godin. Au centre de l'école, à la place de l'église initialement prévue par Fourier, Godin préfère édifier un théâtre à l'italienne.

Disposée au centre du site, en face du pavillon central, afin de montrer son importance et sa fonction stratégique, l'école constitue l'innovation principale de Godin. La réforme architecturale a déjà une mission d'éducation : si l'ouvrier va au cabaret, si la famille ouvrière se délite, si les enfants vagabondent, c'est d'abord parce que jusqu'à présent le logement ouvrier était un taudis sordide et insalubre. En proposant un logement et une architecture créant la condition des satisfactions des besoins élémentaires, la famille ouvrière est protégée de la débauche et de l'immoralité. Elle acquiert le sentiment d'une assurance de bien-être. Mais les dispositions architecturales du logement ne suffisent pas pour éduquer les ouvriers. L'école est ainsi la clé de voûte du système familistérien, indispensable à la réussite du projet de Godin. Au centre de l'école, à la place de l'église initialement prévue par Fourier, Godin préfère édifier un théâtre à l'italienne.

cette école, mise en place dès les années 1860, soit 20 ans avant les lois Jules Ferry du 27 juillet 1882, est gratuite, obligatoire, laïque et mixte. L'école doit bénéficier des mêmes dispositifs architecturaux que les logements : lumière, aération, propreté, hygiène, confort.

cette école, mise en place dès les années 1860, soit 20 ans avant les lois Jules Ferry du 27 juillet 1882, est gratuite, obligatoire, laïque et mixte. L'école doit bénéficier des mêmes dispositifs architecturaux que les logements : lumière, aération, propreté, hygiène, confort.

Pour Godin, l'éducation est un équivalent de la richesse. Plus que Charles Fourier, c'est Jean-Jacques Rousseau et Condorcet  qui servent de références à l'industriel, même s'il va s'en écarter pour proposer une formule originale, anticipant l'école républicaine de Jules Ferry. Pour lui, l'éducation doit être complète : physique, manuelle, intellectuelle, morale. Pour atteindre cette complétude, l'éducation doit être décloisonnée. Afin d'être réellement efficace, et de permettre aux élèves de progresser et de devenir des citoyens, la laïcité est une condition non négociable.

Pour Godin, l'éducation est un équivalent de la richesse. Plus que Charles Fourier, c'est Jean-Jacques Rousseau et Condorcet qui servent de références à l'industriel, même s'il va s'en écarter pour proposer une formule originale, anticipant l'école républicaine de Jules Ferry. Pour lui, l'éducation doit être complète : physique, manuelle, intellectuelle, morale. Pour atteindre cette complétude, l'éducation doit être décloisonnée. Afin d'être réellement efficace, et de permettre aux élèves de progresser et de devenir des citoyens, la laïcité est une condition non négociable.

De nombreux dispositifs favorisent l'hygiène, la propreté et le confort, dont la satisfaction est une condition de possibilité du progrès social, moral et intellectuel. Chaque étage est muni de toilettes et de fontaines. De plus, chaque pièce d’eau dans les logements bénéficie de l’eau chaude qui est directement récupérée de l’usine. La récupération des eaux chaudes industrielles pour les usages domestiques avait déjà été mise en œuvre à partir de 1855 dans les cités ouvrières de Mulhouse. Lavoirs et bains y étaient alimentés en eau chaude d'une température de 30 ou 40 °C. C'est un élément qui a certainement servi d'exemple à Godin, même s'il ne revendique pas cette influence, jugeant le modèle des cités ouvrières insuffisant et très différent de son projet de Familistère. Enfin, les femmes peuvent nettoyer les vêtements dans la buanderie, à côté de la piscine.

De nombreux dispositifs favorisent l'hygiène, la propreté et le confort, dont la satisfaction est une condition de possibilité du progrès social, moral et intellectuel. Chaque étage est muni de toilettes et de fontaines. De plus, chaque pièce d’eau dans les logements bénéficie de l’eau chaude qui est directement récupérée de l’usine. La récupération des eaux chaudes industrielles pour les usages domestiques avait déjà été mise en œuvre à partir de 1855 dans les cités ouvrières de Mulhouse. Lavoirs et bains y étaient alimentés en eau chaude d'une température de 30 ou 40 °C. C'est un élément qui a certainement servi d'exemple à Godin, même s'il ne revendique pas cette influence, jugeant le modèle des cités ouvrières insuffisant et très différent de son projet de Familistère. Enfin, les femmes peuvent nettoyer les vêtements dans la buanderie, à côté de la piscine.

La piscine au-dessus de la buanderie, ayant une surface de 50 mètres carrés, possède un plancher amovible, qui varie en fonction des compétences des nageurs. Sa profondeur maximale est de 2 mètres 50. Tous les Familistériens peuvent s'y rendre à n'importe quelle heure de la journée. Godin offre ainsi aux habitants la possibilité de s'adonner à la natation, qui est considérée au XIXème siècle comme une pratique certes hygiénique, stimulante et fortifiante, mais avant tout luxueuse. Là encore Godin s'est probablement inspiré des cités ouvrières de Mulhouse qui bénéficiaient dès 1864 d'une grande piscine de 112 mètres carrés. Il n'en demeure pas moins que le sol amovible est une innovation de Godin qui révèle sa préoccupation pédagogique.

La piscine au-dessus de la buanderie, ayant une surface de 50 mètres carrés, possède un plancher amovible, qui varie en fonction des compétences des nageurs. Sa profondeur maximale est de 2 mètres 50. Tous les Familistériens peuvent s'y rendre à n'importe quelle heure de la journée. Godin offre ainsi aux habitants la possibilité de s'adonner à la natation, qui est considérée au XIXème siècle comme une pratique certes hygiénique, stimulante et fortifiante, mais avant tout luxueuse. Là encore Godin s'est probablement inspiré des cités ouvrières de Mulhouse qui bénéficiaient dès 1864 d'une grande piscine de 112 mètres carrés. Il n'en demeure pas moins que le sol amovible est une innovation de Godin qui révèle sa préoccupation pédagogique.

La disposition des briques de la buanderie vise avant tout à faire circuler l'air pour éviter la condensation. Mais cette disposition doit être esthétique, car la beauté est aussi un équivalent de la richesse auquel les ouvriers ont droit.

La disposition des briques de la buanderie vise avant tout à faire circuler l'air pour éviter la condensation. Mais cette disposition doit être esthétique, car la beauté est aussi un équivalent de la richesse auquel les ouvriers ont droit.

La solidarité des briques est à l'image de la fraternité que Godin veut réaliser au sein de son Familistère, tout en laissant à chaque élément suffisamment d'espace pour éviter la promiscuité.

La solidarité des briques est à l'image de la fraternité que Godin veut réaliser au sein de son Familistère, tout en laissant à chaque élément suffisamment d'espace pour éviter la promiscuité.

Les joints dessinent une ruche, allégorie du Familistère.

Les joints dessinent une ruche, allégorie du Familistère.

  1. Le Familistère : un Palais social favorisant la liberté, l’égalité et la fraternité

 

  • JBA Godin prend le meilleur de tous les systèmes d’habitation pour créer une organisation architecturale originale
  • On peut parler de syncrétisme architectural
Pour la disposition des bâtiments, afin de donner à ses ouvriers un véritable « Palais social », Godin s'inspire des plans de Ange-Jacques Gabriel pour Versailles. Ainsi le Familistère est composé de plusieurs corps de bâtiment reliés entre eux : il comprend le Palais social à proprement parler (un pavillon central d'une façade de 65 mètres, encadré par deux ailes de taille un peu plus modestes, destinés à l'habitation, de 50 mètres de façade chacun), et le pavillon Cambrai (situé à l'écart du Palais social en face de son aile droite, lui aussi destiné à l'habitation. C'est le bâtiment le plus tardif, construit en 1883). Chacun de ces pavillons a la forme d'un parallélogramme. Les murs extérieurs sont construits en briques et ont 45 centimètres d'épaisseur. La façade du palais est de 180 mètres, et son périmètre de 450 mètres.

Pour la disposition des bâtiments, afin de donner à ses ouvriers un véritable « Palais social », Godin s'inspire des plans de Ange-Jacques Gabriel pour Versailles. Ainsi le Familistère est composé de plusieurs corps de bâtiment reliés entre eux : il comprend le Palais social à proprement parler (un pavillon central d'une façade de 65 mètres, encadré par deux ailes de taille un peu plus modestes, destinés à l'habitation, de 50 mètres de façade chacun), et le pavillon Cambrai (situé à l'écart du Palais social en face de son aile droite, lui aussi destiné à l'habitation. C'est le bâtiment le plus tardif, construit en 1883). Chacun de ces pavillons a la forme d'un parallélogramme. Les murs extérieurs sont construits en briques et ont 45 centimètres d'épaisseur. La façade du palais est de 180 mètres, et son périmètre de 450 mètres.

Pavillon central du Familistère de Guise.

Pavillon central du Familistère de Guise.

Le Familistère ne se réduit pas à un ensemble d'habitations. On a vu que le site comprenait une buanderie et une piscine. En face des habitations, Godin fait construire deux autres bâtiments : les économats et l'école adossée de part et d'autre d'un théâtre à l'italienne. Les économats sont des magasins qui donnent aux Familistériens des produits alimentaires à un prix plus abordable et meilleur marché que dans le centre-ville. Le Familistère achète les produits en gros, ce qui permet d'obtenir des prix bon marché. De plus, Godin réfléchit dès 1860 à la répartition des bénéfices des magasins du Familistère en proportion de la consommation de chacun. En 1880, l'Association du capital et du travail stipule que les bénéfices des magasins doivent être répartis indifféremment à l'ensemble des membres de l'association. En 1862, le Familistère comprend une épicerie, un dépôt de pain, une boucherie et une charcuterie, un restaurant, un débit de boissons, un service de comestibles (les plats préparés), une mercerie, des comptoirs de bonneterie, de chaussures, d'étoffes et de confection, un dépôt de combustibles. Une boulangerie apparaît en 1889.  	Ainsi, grâce notamment au service de comestibles, les femmes peuvent acheter des plats déjà préparés quand elles reviennent de l’usine. Cela leur évite de s’épuiser dans les tâches ménagères, après une longue journée de travail. On profite ainsi de la vie de famille et des enfants tout en améliorant l'alimentation des familles.

Le Familistère ne se réduit pas à un ensemble d'habitations. On a vu que le site comprenait une buanderie et une piscine. En face des habitations, Godin fait construire deux autres bâtiments : les économats et l'école adossée de part et d'autre d'un théâtre à l'italienne. Les économats sont des magasins qui donnent aux Familistériens des produits alimentaires à un prix plus abordable et meilleur marché que dans le centre-ville. Le Familistère achète les produits en gros, ce qui permet d'obtenir des prix bon marché. De plus, Godin réfléchit dès 1860 à la répartition des bénéfices des magasins du Familistère en proportion de la consommation de chacun. En 1880, l'Association du capital et du travail stipule que les bénéfices des magasins doivent être répartis indifféremment à l'ensemble des membres de l'association. En 1862, le Familistère comprend une épicerie, un dépôt de pain, une boucherie et une charcuterie, un restaurant, un débit de boissons, un service de comestibles (les plats préparés), une mercerie, des comptoirs de bonneterie, de chaussures, d'étoffes et de confection, un dépôt de combustibles. Une boulangerie apparaît en 1889. Ainsi, grâce notamment au service de comestibles, les femmes peuvent acheter des plats déjà préparés quand elles reviennent de l’usine. Cela leur évite de s’épuiser dans les tâches ménagères, après une longue journée de travail. On profite ainsi de la vie de famille et des enfants tout en améliorant l'alimentation des familles.

Après son échec politique, Godin décide de se concentrer sur son entreprise à Guise. Très vite, il connaît une ascension économique grâce à son poêle en fonte et son entreprise grandit de jour en jour.  Il passe alors de la production artisanale à la production industrielle et déménage en 1846 à Guise pour agrandir son lieu de production et bénéficier du commerce fluvial de l'Oise. Il transfère ses ateliers avec une vingtaine d'ouvriers. Un an plus tard, en 1847, il dispose de 50 ouvriers, 190 en 1849 puis 330 en 1857. En 1862, Godin recourt à nouveau au brevetage pour se protéger des contrefaçons et de la concurrence déloyale. A l'occasion de l'Exposition universelle de Londres, il dépose un brevet pour un procédé d'émaillage polychrome de la fonte. L'objectif est de donner à ses produits le double caractère de l'originalité et du luxe. Godin a un sens aigu de ce que nous appelons aujourd'hui le design. Il est persuadé que pour gagner la bataille de la compétitivité, il faut proposer des produits à la fois efficaces et beaux.

Après son échec politique, Godin décide de se concentrer sur son entreprise à Guise. Très vite, il connaît une ascension économique grâce à son poêle en fonte et son entreprise grandit de jour en jour. Il passe alors de la production artisanale à la production industrielle et déménage en 1846 à Guise pour agrandir son lieu de production et bénéficier du commerce fluvial de l'Oise. Il transfère ses ateliers avec une vingtaine d'ouvriers. Un an plus tard, en 1847, il dispose de 50 ouvriers, 190 en 1849 puis 330 en 1857. En 1862, Godin recourt à nouveau au brevetage pour se protéger des contrefaçons et de la concurrence déloyale. A l'occasion de l'Exposition universelle de Londres, il dépose un brevet pour un procédé d'émaillage polychrome de la fonte. L'objectif est de donner à ses produits le double caractère de l'originalité et du luxe. Godin a un sens aigu de ce que nous appelons aujourd'hui le design. Il est persuadé que pour gagner la bataille de la compétitivité, il faut proposer des produits à la fois efficaces et beaux.

Godin dépose un brevet de dix ans le 15 juillet 1840 pour la production d'un poêle à charbon en fonte de fer. C'est cette invention qui va lui permettre de faire fortune, de devenir un véritable capitaine d'industrie, et de financer son projet du Familistère.

Godin dépose un brevet de dix ans le 15 juillet 1840 pour la production d'un poêle à charbon en fonte de fer. C'est cette invention qui va lui permettre de faire fortune, de devenir un véritable capitaine d'industrie, et de financer son projet du Familistère.

De simple artisan, Godin est devenu un capitaine d'industrie. Son entreprise est florissante et devient même la première production de poêle en fonte en Europe. Ses usines de Guise et de Bruxelles sont estimées à sept millions de francs en 1874.  Il décide alors de tenir sa promesse de jeunesse, et d'utiliser son capital au service du travail et de l'émancipation de la classe ouvrière. Il acquiert dès 1857 des terrains au nord de la ville de Guise, juste à côté de son usine. Dès cette année de 1857 est créé un jardin d'agrément en bordure de l'Oise, près de l'usine, afin de permettre à ses ouvriers de se délasser pendant les pauses.  Les travaux de construction de ce que sera son Palais social démarrent en 1859.

De simple artisan, Godin est devenu un capitaine d'industrie. Son entreprise est florissante et devient même la première production de poêle en fonte en Europe. Ses usines de Guise et de Bruxelles sont estimées à sept millions de francs en 1874. Il décide alors de tenir sa promesse de jeunesse, et d'utiliser son capital au service du travail et de l'émancipation de la classe ouvrière. Il acquiert dès 1857 des terrains au nord de la ville de Guise, juste à côté de son usine. Dès cette année de 1857 est créé un jardin d'agrément en bordure de l'Oise, près de l'usine, afin de permettre à ses ouvriers de se délasser pendant les pauses. Les travaux de construction de ce que sera son Palais social démarrent en 1859.

Le Familistère se situe aux bords de l'Oise, afin de bénéficier du commerce fluvial.

Le Familistère se situe aux bords de l'Oise, afin de bénéficier du commerce fluvial.

Les Familistériens bénéficient du progrès technologique, architectural, économique et social, mais ils ne sont pas pour autant coupés de la nature.

Les Familistériens bénéficient du progrès technologique, architectural, économique et social, mais ils ne sont pas pour autant coupés de la nature.

Vue du pavillon gauche, côté jardin.

Vue du pavillon gauche, côté jardin.

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