Lettre de René Jacob commentée par les 3eD
Année scolaire 2017-2018 – Collège Jules Vallès de Saint Leu d'Esserent
Niveau troisième – séquence 1 : écrire la guerre, témoigner pour résister
Séance 2
Support : Lettre de René Jacob à sa femme. Extrait de Paroles de Poilus, Lettres et carnets du front 1914-1918 rassemblés par Jean-Pierre Guéno et Yves Laplume
Objectifs :
- découvrir une description apocalyptique du champ de bataille
- comprendre que la littérature est une recherche pour dire l'indicible
Synthèse collective élaborée à partir des commentaires de Clément, Lucie, Naomie, Emmy, Matthias, Juliette, Aloïs, Faustine, Clarisse, Estelle, Dylan.
Ce texte est une lettre de René Jacob à sa femme. Cette lettre est une description du champ de bataille, au début de la Première Guerre mondiale (1914-1918), au moment de la bataille de la Marne. On remarque que c'est une description car il décrit ce qu'il voit. La comparaison « comme si un rideau de théâtre s'était levé » permet d'insister sur la dimension spectaculaire de ce qu'il décrit. Les couleurs dominantes sont sombres et laides : « noirâtres », « verdâtres ». Ce sont des couleurs qui insistent sur la saleté grâce au suffixe péjoratif -âtre. Il décrit aussi à l'aide du toucher, lorsqu'il évoque le contact du vent sur sa peau. Il évoque également ce qu'il sent comme le prouve l'expression suivante : « une odeur effroyable », « une odeur de charnier ». La description du spectacle macabre est complétée par l'évocation de ce qu'il entend : « le bourdonnement des essaims de mouches », « le silence ». Grâce à l'utilisation des quatre sens (la vue, l'ouïe, le toucher, l'odorat), on imagine un paysage sombre, sinistre, morbide. C'est un spectacle d'horreur et de désolation. Ce qu'il décrit est tellement horrible qu'il cherche les mots : « Comment dire ? Comment décrire ? » Ces questions rhétoriques montrent le caractère inouï et atroce du champ de bataille après les combats et interpellent le lecteur. L'auteur éprouve du dégoût.
Tout au long du texte l'auteur insiste sur une idée importante : il montre que tout a été détruit : les hommes, les animaux, la nature. L'auteur insiste sur le mot « cadavre » en faisant une énumération qui souligne l'accumulation des morts. L'anaphore du mot « cadavre » permet en outre de montrer l'omniprésence de la mort : « des cadavres allemands […], des cadavres noirâtres, verdâtres, décomposés […], des cadavres d'hommes […], des cadavres de chevaux […], des cadavres qu'on recouvre de chaux ou de paille. » Cette image dévoile une dimension essentielle du texte : l'Apocalypse. C'est la mort qui domine. René Jacob décrit le champ de bataille comme une apocalypse car il voit la mort des humains, des chevaux, du paysage et de la nature. On a l'impression que le monde va disparaître, tout est détruit : « saccage abominable », « ruine des choses ». Nonobstant le plus difficile pour lui reste « les cadavres de chevaux, plus douloureux encore que des cadavres d'hommes ». En effet, aux yeux du narrateur, les chevaux n'ont rien demandé et sont les victimes d'un conflit provoqué par les humains. René Jacob ressent de la peine. Il a le cœur meurtri par la mort des bêtes. Les animaux pourtant innocents sont sacrifiés sur l'autel de la guerre. Il met en scène cette tristesse et ce dégoût : « elle nous prend à la gorge », « je la sens éparse autour de moi », « me fait chavirer le coeur ». L'auteur décrit un paysage sombre, sinistre et morbide, car il n'y a personne et le seul bruit qu'il entend est celui des bourdonnements des essaims de mouches sur les cadavres. Il met aussi en relief l'horreur de la guerre grâce à la phrase non verbale : « non pas champ de bataille, mais champ de carnage. » Enfin, l'auteur emploie une structure emphatique qui permet de mettre en relief la violence de la destruction et d'insister sur son traumatisme : « ce que je n'oublierai jamais, c'est la ruine des choses, c'est le saccage abominable des chaumières, c'est le pillage des maisons. » Cette structure emphatique est en même temps une gradation qui met l'accent sur les conséquences apocalyptiques de la déflagration.
Au terme de ce parcours, l'auteur nous fait comprendre que la guerre ne fabrique pas des héros, mais seulement des morts. C'est la fin du monde pour lui. C'est pourquoi il éprouve sans doute le besoin d'écrire cette lettre, pour faire une catharsis, afin de se libérer de ce traumatisme, de ce qu'il a vu, de ce qu'il a entendu, de ce qu'il a touché, de ce qu'il a senti. J'aime bien ce texte car il montre que la guerre ne sert à rien et laisse un paysage apocalyptique derrière elle. Et personne n'en sort vraiment vainqueur. Je dirai donc que ce texte dévoile un aspect important de la guerre, non pas que la guerre fabrique des monstres, comme dans le poème d'Henri Aimé Gauthé, mais qu'elle fait couler le sang d'hommes et d'animaux qui sont souvent innocents. Cette lettre met en lumière le vrai visage de la guerre.
Pour moi, ce texte est horrible car il souligne les pires atrocités de la guerre : le saccage, la mort, le désespoir. Cette lettre ne me met pas à l'aise. J'imagine la scène et les sentiments que l'auteur a du avoir et cela m'envahit de tristesse. Nonobstant, j'aime le moment où il compare son arrivée sur le champ de bataille à une scène de théâtre : « comme si un rideau de théâtre s'était levé devant nous, le champ de bataille nous est apparu dans toute son horreur. » Malgré l'atrocité que cela doit être, cette description m'a permis de m'y projeter et de mieux visualiser le champ de bataille. Ce texte est très fort parce qu'il décrit sans filtre les cadavres. Ce texte fait froid dans le dos. Le lecteur imagine une scène apocalyptique où la vie ne reviendra plus. Je trouve ce texte intéressant car il nous permet de comprendre clairement le déroulé des événements. Pour moi, ce texte représente la vérité. Il est choquant et réaliste. J'aime cette lettre car l'auteur nous dévoile ses sentiments, sa peine et son horreur.