Comparaison entre le chapitre II du Silence de la mer et l'incipit de l'Ile au trésor par Fiona et Lilou
Image extraite de Nosferatu de Murnau, film fantastique sorti en 1922, adaptation de Dracula de Bram Stoker. L'apparition fantastique de Werner von Ebrennac dans Le Silence de la mer fait penser à celle d'un spectre déshumanisé ou à celle d'un vampire. D'ailleurs, l'Occupation allemande consistait à parasiter et à vampiriser la France.
L’auteur utilise plusieurs adjectifs pour décrire le personnage : “vieux,rôtie,grand,athlétique,couleur de brique,bleu,énormes,calleuses,blanchâtre et livide….” Et aussi des phrases déclaratives. Il décrit le personnage comme un vieux marin, comme un homme ayant subi plusieurs balafres, un homme qui visiblement passe sa vie dehors : “C’est alors qu’un vieux marin, à la face rôtie par le soleil et balafrée d’une immense estafilade.” ligne.4 Les adjectifs qualificatifs “vieux”, “ rôtie”, et “balafrée” permettent d'insister sur l'expérience du personnage. Celui-ci a une épaisseur et une profondeur liées à sa durée dans le temps et à sa force de résistance dans un univers violent et marqué par la guerre ou les combats.
Il est également décrit comme quelqu’un d’imposant, de lourd comme le prouve l'expression suivante: “arrivant d’un pas lourd à la porte de chez nous, suivi de son coffre de matelot qu’un homme traînait dans une brouette.” (ligne.4-5) Le personnage ne vient pas sans bagage. Il emmène avec lui un attirail qui résulte d'aventures précédentes. Cela permet de conférer une dimension réaliste au personnage. Puis il est aussi décrit comme quelqu’un assez impressionnant. Pour cela, l’auteur utilise l’énumération suivante : “Il était grand, d’apparence athlétique, avec une face au teint couleur de brique, une queue goudronnée qui battait le col graisseux de son vieil habit bleu, des mains énormes, calleuses, toutes couturées de cicatrices, et ce coup de sabre qui avait laissé sur sa face, du front au bas de la joue gauche, un sillon blanchâtre et livide” ligne.5-6 C’est également un rythme accumulatif qui permet de dresser un portrait inquiétant avec précision. L’auteur utilise également une hyberbole : “frappait comme un sourd à la porte.” l.13 Cette comparaison hyperbolique insiste sur la rudesse du personnage.
Nous pouvons également remarquer un champ lexical du chant de la ligne 7 à la ligne 13: “sifflotant, fredonnant, chanson, entendre, voix, accompagnement, frappait, chantait”. Cela permet de montrer que le personnage possède sa propre musique. On l'entend avant de le voir, ce qui crée du suspense et suscite la curiosité du lecteur. Le personnage se présente comme un étranger, il reste mystérieux et nous n’apprenons rien sur le lien qu’il entretient avec les autres personnages. Il n’y a aucun lieu ni aucune date précisées, on n’a également aucune idée de l'identité de l’homme qui va s’installer dans la maison du narrateur.
Nous pouvons donc comparer le Silence de la mer de Vercors et l'incipit de L'Ile au trésor de Robert Louis Stevenson sur plusieurs points. Tout d’abord sur le fait qu’il n’y ait aucun lieu ni aucune dates précisées, on ne connaît pas l’identité du personnage qui entre en scène, ni même le lien qu’il entretient avec les autres personnages. Vercors et Stevenson ont la même manière de faire passer un message, philosophique et implicite à travers l'intrigue et les personnages. De plus, leurs récits possèdent une même tonalité fantastique. Ensuite l’auteur est également le principal observateur dans les deux livres, donc ils utilisent le point de vu interne. Les deux personnages sont également rattachés au bruit, afin de montrer qu’ils sont les éléments perturbateurs. On ne parle que d’eux et on n’entend qu’eux.
Pour finir, il y a aussi l’instauration d’un rituel dans les deux récits : “continua de boire”, “termina la pièce qu’elle avait commencé d’y coudre” p.22 pour le Silence de la mer. Et “Il le but lentement, en connaisseur” l.15 pour l'incipit de L'Ile au trésor.