Ici tout va mal par Manon
Chère Mathilde,
Ici, tout va mal, le sol est recouvert de balles, d'obus, mais surtout recouvert de sang et de dépouilles. Des centaines de soldats meurent tous les jours. Aujourd'hui encore, j'ai perdu un de mes amis proches. Il est mort d'un obus lui tombant dessus alors que je l'aidais à se défaire du piège des barbelés. Toutes ses tripes me sont tombées dessus. Jamais je n'avais été aussi horrifié de toute ma vie.
Trop de questions défilent en ce moment-même dans ma tête : pourquoi tant de haine ? Pourquoi tant de violence ? Pourquoi tant de sang ? Je me sens mal, très mal. Je pleure chaque jour, à chaque heure, je crie, je désespère de voir un jour cette guerre se finir. Je suis de plus en plus seul, je vois mes amis mourir les uns après les autres. Je veux rentrer, je ne peux plus supporter de voir ces corps décomposés, verdâtres, noirâtres et grouillant de vers. L'odeur de la mort est omniprésente et insoutenable. Nombreux sont les rats venus manger les dépouilles des corps innocents. Les conditions de vie sont de plus en plus difficiles, car nous voilà pleins de poux, de boue, nos vêtements déchirés, usés, nous sommes sales et attirons toute sorte de bêtes plus répugnantes les unes que les autres.
Le sergent reste malheureusement intransigeant sur le fait d'abandonner ce combat, ce champ de bataille, ce cimetière. J'ai pourtant essayé de rentrer pour te retrouver en tentant de me faire blesser et de faire passer cela pour un accident, mais le sergent a compris la ruse...Je suis actuellement en route pour la cour martiale où je serai fusillé pour tentative d'évasion d'un combat.
Voici donc ma dernière lettre. Je m'en veux terriblement de te laisser seule, tout cela à cause d'un geste égoïste. J'ai été idiot...Je te demande pardon.
Tu es la plus belle chose qui me soit arrivée. Je t'aime du plus profond de mon coeur.
Adieu.
Ton amour, Manech.